Biographie
Je crois que tout est là. Dans cette petite photo. Enfin presque. Je venais d’avoir mon bac. Avec mon premier salaire, je voulais m’offrir un appareil photo. Mon père voyageait beaucoup. C’est lui qui me l’a rapporté du Japon. Cette photo, c’est la première. C’est mon père qui l’a faite. Il a eu l’idée du miroir. Je ne sais pas pourquoi. Mais je me souviens très bien de la discussion : le reflet, la réalité, la netteté, la profondeur de champ. Ce jour-là, j’ai compris que la photographie était une reconstruction du réel. Ce jour-là, j’ai fait mes premiers pas dans la fiction photographique. Cette photo, je l’aime bien, je me reconnais. C’est peut-être la photo inaugurale.
Ma recherche a pour objet de questionner les rapports “photo-graphiques” qui se nouent dans le photographique. Comment appréhender leurs limites, éprouver leur résistance, mesurer leurs écarts? Photographier “pour” mémoire. Photographier “de” mémoire. Une question de frontière. Déplacer les seuils. Se situer sur la frange, à la lisière, entre. Une question de temps. Explorer cet entre-deux, cet espace-temps de l’indicible, aux temporalités plurielles et entremêlées, entre mémoire et oubli, photographie et peinture, net et flou, fiction et réalité, là où tout est encore possible et mouvant. Se situer dans l’écho. Et inscrire ce moment dans la réalité. Une affaire d’écriture. Auto(photo)biographique. Une écriture du temps.
Frédérique Bouet, Photographe Plasticienne